Chirurgie orthognatique

La chirurgie orthognatique permet, à l’aide de diverses techniques d’ostéotomies (sections osseuses), de remettre en bonne position les  bases osseuses des maxillaires sur lesquelles sont situées les arcades dentaires,  composées elles-mêmes des structures osseuses alvéolaires et des dents.

Ces malpositions  maxillaires  sont le plus souvent congénitales, isolées ou familiales, mais font parfois suite à un traumatisme. Elles apparaissent  ou s’accentuent  pendant la période de la croissance.

Dans les cas typiques,  les rapports normaux des dents sont perturbés, avec troubles de l’occlusion dentaire (défaut  ou absence d’occlusion, béances, égressions dentaires…). Divers retentissements fonctionnels s’y associent: troubles de la mastication, troubles dentaires (malpositions, processus carieux précoce, pertes dentaires), difficultés d’élocution, de déglutition, de respiration, apnées du sommeil, retentissement au niveau des articulations temporo-mandibulaires (ATM). Et pour traiter ces anomalies des positions osseuses, un simple alignement dentaire orthodontique ne suffit pas, car il y a un risque important de récidive à l’arrêt du traitement; le recours à une chirurgie est donc souvent justifié.

Le retentissement esthétique sera aussi  soigneusement analysé pendant la consultation : malpositions dentaires, anomalie de position des lèvres (rapport inversé, lèvre supérieure courte ou bien longue, mauvaise occlusion labiale), anomalie du sourire (absence d’exposition des dents ou au contraire sourire gingival), trouble de l’harmonie du visage du fait des déformations osseuses existantes (asymétrie faciale, menton proéminent ou bien trop effacé,…). Dans certains cas, l’articulé dentaire est pratiquement  normal, et la demande est essentiellement esthétique ; une analyse rigoureuse clinique et des motivations permettra alors de juger de l’opportunité d’un traitement ortho-chirurgical morphologique.

Le type de chirurgie se décide uniquement après analyse radiographique et céphalométrique, qui évalue l’importance du décalage osseux . Une étude des moulages dentaires est aussi réalisée. Les critères esthétiques sont pris en compte, avec les souhaits spécifiques des patients, mais aussi l’information sur les effets induits, le plus souvent bénéfiques,  liés à la modification osseuse envisagée. Une simulation morphologique  numérique participe à cette information.

La chirurgie  intéresse selon les cas le maxillaire (mâchoire supérieure), ou bien la mandibule (mâchoire inférieure) ; elle est parfois bi maxillaire (mâchoires supérieure et inférieure) si le décalage est très important,  avec deux temps opératoires dans les cas complexes.

Un traitement orthodontique de 6 à 12 mois précède en général la chirurgie. Ce traitement corrige les malpositions dentaires et prépare à obtenir un alignement et un engrènement dentaire optimal pour l’opération, réduisant ainsi le risque de récidive. Il sera poursuivi pendant 4 à 12 mois après l’intervention, pour réaliser les ajustements dentaires nécessaires et garantir la stabilité du résultat. Une collaboration étroite entre le chirurgien et l’orthodontiste est nécessaire tout au long du traitement

L’intervention chirurgicale est menée sous anesthésie générale avec une hospitalisation de courte durée (2 à 6 jours). Les incisions chirurgicales sont internes, intrabuccales, au  niveau de la muqueuse , et vont permettre d’effectuer les mobilisations osseuses souhaitées après la réalisation des ostéotomies. Les fragments mobilisés sont fixés en bonne position par du matériel de synthèse miniaturisé (plaques et vis), qu’il n’est en général pas nécessaire de retirer par la suite. La consolidation est obtenue en 6 semaines environ.

Les interventions les plus fréquentes sont :

  • l’ostéotomie de Le Fort 1 : elle permet de corriger les anomalies de positionnement du squelette de la mâchoire supérieure (maxillaire) qui est situé trop en arrière (rétromaxillie), ou trop en avant (promaxillie), parfois asymétrique, ou présentant un défaut dans le sens vertical (face longue ou courte). Ces anomalies sont le plus souvent  responsables de troubles de l’occlusion dentaire. Mais parfois l’articulé est correct et  l’indication est seulement  esthétique, notamment  dans le cas de face trop haute (long face), ou de sourire gingival

Le traitement chirurgical va permettre de mobiliser l’ensemble de l’arcade dentaire supérieure avec le palais

Selon les cas, le mouvement se fait  un sens antérieur (avancée), ou bien verticalement (abaissement ou impaction), parfois latéralement (asymétrie faciale). Les mouvements peuvent être combinés entre eux selon l’objectif recherché, et parfois associés à une rotation du maxillaire autour d’un axe antéro-postérieur (impaction et/ou augmentation de hauteur latérales), d’un axe transversal (bascule antérieure et/ou impaction postérieure), ou bien d’un axe vertical  (dérotation). Une séparation supplémentaire intermaxillaire peut être effectuée dans le même temps pour corriger une anomalie transversale associée (cf.).

Il en résulte une amélioration fonctionnelle avec restauration de l’articulé, mais aussi esthétique liée au mouvement réalisé, comme une meilleure projection de la lèvre supérieure et  une diminution des sillons naso-géniens en cas d’avancée, une réduction  de l’excès d’exposition des dents et des gencives au sourire  en cas d’impaction, un meilleur positionnement du bord libre des incisives supérieures en cas d’abaissement, un recentrage du point inter-incisif en cas de rotation.

 

avancee-maxillaire
Exemple d’ostéotomie de Le Fort 1 avec avancée maxillaire

 

Exemple d’ostéotomie de Le Fort 1 avec impaction du maxillaire
Exemple d’ostéotomie de Le Fort 1 avec impaction du maxillaire

  • l’ostéotomie mandibulaire  permet de corriger les anomalies de positionnement du squelette de la mâchoire inférieure qui peut être soit trop en avant (prognathe), soit trop en arrière (retrognathie), voire asymétrique.

L’ensemble de l’arcade dentaire inférieure et le menton est mobilisé.

Les mouvements est essentiellement antéro-postérieur (avancée ou recul), et  vertical par rotation au niveau de l’angle de la mâchoire (abaissement, élévation). Il  peut être asymétrique pour corriger une rotation ou un décalage de l’arcade dentaire, ou bien une asymétrie faciale. Dans ce dernier cas, ou quand les décalages sont trop importants,  il est souvent nécessaire d’associer une ostéotomie de Lefort 1 pour repositionner aussi le maxillaire ; on parle alors d’ostéotomie bi maxillaire (cf.).

Il en résulte une amélioration fonctionnelle avec restauration de l’articulé, mais aussi esthétique liée au mouvement réalisé, comme une meilleure projection de la lèvre inférieure et du menton, une réduction d’une asymétrie.

Exemple d’ostéotomie mandibulaire de recul
Exemple d’ostéotomie mandibulaire de recul

 

Exemple d’avancée mandibulaire avec génioplastie
Exemple d’avancée mandibulaire avec génioplastie
  • ostéotomie bi-maxillaire

L’ostéotomie bimaxillaire est une intervention qui associe dans le même temps opératoire la mâchoire supérieure (maxillaire) et la machoire inférieure (mandibule).

Elle est indiquée quand les anomalies du squelette de la face intéressent en même temps  le maxillaire et la mandibule ; par exemple dans les asymétries faciales, ou bien lorsque les décalages sont trop importants (plus de 1cm) pour être traités par une seule ostéotomie.

-ostéotomie segmentaire : elle est indiquée pour traiter une anomalie d’alignement ne concernant qu’un segment maxillaire (secteur antérieur incisif et canin, ou bien secteur postérieur prémolaire et molaire) ou bien un segment mandibulaire (essentiellement secteur incisif et canin). Ces ostéotomies segmentaires peuvent être réalisées de façon isolées, ou bien être combinées avec d’autres types d’ostéotomies. On en rapproche la disjonction intermaxillaire qui permet de séparer en deux le maxillaire lors  de l’ostéotomie de Lefort 1 afin de corriger simultanément  une anomalie transversale de l’articulé.

Renseignements pratiques

Préparation: Douche antiseptique la veille
Temps d’hospitalisation: 2 à 3 jours
Durée de la chirurgie: 1H30 à 2H30
Anesthésie: Générale
Douleurs:

Modérées 2/7 à moyenne 3,5 /7 calmée selon les cas par antalgiques léger, codéinés ou morphiniques en courte durée.

Soins:

Pas de drain le plus souvent, pansement postopératoire modelant et légèrement compressif, vessie de glace, corticothérapie de courte durée, soins de bouche à partir du lendemain, blocage par élastiques de 4 à 8 jours en moyenne parfois plus prolongé selon l’intervention, alimentation liquide puis molle et mixée jusqu’à consolidation osseuse (3 à 6 semaines) et riche pour limiter l’amaigrissement et faciliter la consolidation

Complications: retard de consolidation, fracture maxillaire, saignements, infection, traumatisme dentaire ; trouble de la sensibilité dentaire, gingivale, labiale, jugale, linguale : le plus souvent transitoire ; trouble articulaire ; insuffisance de résultat ; grave et exceptionnelle : hémorragie pouvant nécessiter une transfusion ou un geste chirurgical complémentaire, nécrose osseuse.
Contre-indications: Motivation insuffisante, tabac, hypertension, diabète mal équilibré, traitement faisant saigner
Suivi: Visite chirurgicale à 6- 8 jours; contrôle à 1mois, 2 mois, 6 mois et 1 an. Réglage orthodontique précoce, avec poursuite duplan traitement. Parfois kinésithérapie et/ou rééducation orthophonique.
Eviction sociale: 1 à 5 semaines ; sport après 2 mois
Suites immédiates:

Œdème post-opératoire : fréquent, parfois important, maximum au 3ème jour, prédominant au niveau de la zone opérée.